Publié le : 25 Jul 2016
Catégories : Conseils , Le journal



Comment porter son bébé ?

Pour  répondre à cette question, souvenez-vous de la position de votre enfant dans la douce chambre utérine que lui a offerte sa maman pendant neuf mois.

Dans ce lieu, le bébé se trouve entièrement enroulé et enveloppé de la tête aux pieds en passant par le dos, les fesses et les cuisses. Il perçoit alors une continuité corporelle qui lui permet de ressentir une  sécurité interne indispensable à son bien-être, et la face antérieure de son corps si fragile se trouve ainsi bien protégée.

Lorsque sa maman l’a accueilli, elle a spontanément façonné, pour lui, un nouvel écrin, de son menton sur sa tête et de ses mains sur son dos et sous ses fesses. Elle a ainsi assuré sa continuité d’être et son sentiment de sécurité. De même lorsqu’elle le nourrit et le berce.

Ces images doivent vous guider pour porter votre enfant, et vous convaincre que la meilleure façon de le porter, est de le porter en face à face, son ventre contre vous ! Cette position va rassurer votre enfant, lui donner confiance, développer sa motricité et son autonomie, l’éveiller et faciliter sa digestion.


Face à face, vous lui offrez un sentiment de sécurité

Geneviève HAAG, psychiatre et psychanalyste, qui appuie ses recherches sur l’observation du bébé, a montré que sa construction en tant que personne passe par celle d’un « Moi-corporel ». C’est  une prise de conscience par le bébé de son propre corps. Les deux premiers mois de sa vie, le bébé est en fusion totale avec sa maman. Pour lui, sa maman et lui, ne forme qu’un tout. Puis petit à petit, ses ressentis corporels lui permettent de se distinguer de sa maman.

Pour que le bébé construise son « Moi-corporel » de façon harmonieuse, il a besoin d’un fort sentiment de sécurité. Il développera d’autant plus facilement ce sentiment si :

  • Il est porté dans la position rassurante qu’il a connu dans l’utérus : dos soutenu et enroulé.
  • Il peut joindre joindre ses deux mains : c’est « la jonction des deux-hémicorps autour de l’axe corporel », qui offre au bébé un « auto-apaisement ».
  • Il est regardé.

Ces conditions ne sont malheureusement pas offertes à un bébé porté « dos contre votre ventre ». Il se trouve alors en grande difficulté pour se réunir, se retrouve dans une position stressante, dos cambré, bras en chandelier et jambes ballantes, et n’a aucun regard où s’accrocher. La belle promenade ne sera pas très apaisante pour lui….

Une étude de PEGO et VUARTE, deux psychiatres portugais, a montré le lien entre « les qualités d’intimité et de fluidité » du portage et la plus grande assurance de l’enfant.
Les enfants qui avaient été portés avec beaucoup de fluidité, de tendresse et en face à face, ont développé un grand sentiment de sécurité et beaucoup d’assurance. Ils ont fait preuve de sérénité pour partir à l’aventure découvrir le monde et les autres, et ont également développé une meilleure motricité.
Quant aux autres, ils ont eu plus de mal à se détacher de leurs parents et ont fait preuve de peu d’autonomie.

 
Face à Face, vous développez ses capacités motrices

Le  développement psychomoteur du bébé obéit à deux lois.

La loi cephalo-caudale : à sa naissance, le bébé est hypotonique, sa posture est fusionnelle. Son corps semble s’ajuster avec confiance au corps de celui qui le porte. Il va d’abord tenir sa tête, ensuite son dos, puis son bassin et enfin se mettre debout.

Cette évolution se fait bien sûr grâce au développement neuromusculaire programmé mais aussi grâce à l’environnement qui lui est offert. Et dans cet environnement il y a vos bras !
Vibrant à l’essor de votre bébé vous savez d’ailleurs adapter, dans votre portage, la hauteur de votre main. Vous maintenez sa tête, quand il est tout petit, puis seulement le haut de son dos jusqu’à ne plus assurer que son assise sur votre bras. Inconsciemment vous lui demandez un tout petit peu plus que sa zone de confort. Vous le stimulez pour qu’il se tienne !

Votre portage est « vivant »  comme le décrit WINNICOT, pédiatre, psychiatre, psychanalyste anglais. Un portage dialoguant qui offre à l’enfant la possibilité de prendre appui sur vous pour se redresser, s’écarter ou se reposer. Or ce portage ne peut être vivant et dialoguant que dans le face à face.

Dans un portage dos contre soi, le bébé ne trouve aucun appui pour ses bras et ses jambes.
Soit il reste dans l’enroulement et l’hypotonicité, soit, dès qu’il le peut, il se « cabre » pour trouver un appui dorsal. Il développe alors une hypertonicité du dos. Ce qui n’est pas propice au développement de son équilibre.


L’autre loi du développement  psychomoteur dite proximo-distale concerne les membres du bébé.
Ils sont fléchis et hypertoniques à la naissance. C’est progressivement que le bébé va se « déplier ».

Afin de respecter et d’accompagner la progression de ce développement, il est important que les jambes du bébé soient intégrées au portage. Cela ne peut se faire que dans les bras ou en foulard, dans la position en face à face. Certains « kangourous » assurent aussi l’enveloppement des cuisses.
A sa mesure l’enfant déploiera ses jambes, trouvera des appuis pour ses cuisses, ses mollets puis ses pieds et en alternant les appuis, se préparera tranquillement au quatre-pattes et à la marche.

Dans le portage dos contre soi, et dans les « kangourous » n’intégrant pas le port des jambes, tout le poids du corps de l’enfant repose sur son périnée et ses jambes pendent passivement. S’il imprime un mouvement, ce sont des balancements symétriques qui ne le préparent pas à l’alternance nécessaire à la marche.


Face à Face, vous l’éveillez

« On entre dans la vie les poings fermés ».

Durant les premiers mois de sa vie, le bébé va développer sa capacité à attraper. Il a besoin de pouvoir se réunir pour toucher ses mains et les porter à sa bouche. Il commence un jeu d’ouverture et de fermeture de ses mains, et le contact aves ses parents lui offre « sans effort » une grande richesse de sensations.

Ensuite, vers 4 mois et demi, il découvre la coordination œil-main, et commence à attraper tout ce qu’il voit. La position en face à face est alors idéale, puisque le bébé va pouvoir attraper à sa guise le collier ou les boucles d’oreilles de sa maman, le col du polo de son père….

Rien de tel dans le portage face au monde. Les bras sont écartés de façon précoce et on n’attrape guère que du vent !


Vers 8 mois, le bébé va regarder le monde avec ses parents, à travers « l’attention conjointe ».
Le parent regarde ce que le bébé regarde, le bébé regarde ce que son parent regarde, puis ils se regardent pour se questionner. Cet échange permet d’éveiller l’enfant, de communiquer avec lui. Un sourire, une grimace, un non de la tête, une émotion… tous ces petits signes enseignent à l’enfant ce qui est bien, mal, dangereux. 

Mais cette communication non verbale, cette « attention conjointe » n’est pas possible lorsque le bébé est porté face à la route. Il se retrouve seul, face au monde, sans pouvoir comprendre ce qui défile devant ses yeux.


Face à face, vous faciliter la digestion de votre enfant

Durant 25 ans de consultation mère-enfant, j’ai systématiquement observé un lien fort entre la posture du bébé en hyper-extension arrière (bébé cabré, bras en chandelier) et la présence de régurgitation

Un bébé vomisseur se tient-il ainsi à cause de la douleur, ou est-ce cette posture qui entraine des vomissements, à cause du stress ? Je ne saurais répondre à cette question, mais cette observation me fait une fois encore préconiser le portage en face à face qui évite l’hyper-extension arrière.

 

Et si vous avez oublié l’image du bébé dans son nid utérin, je vous propose des « travaux pratiques » !

1. Donnez une poupée à un enfant de deux ans.
il la portera face à face !

2. Visualisez la façon dont vous portez, dans vos bras, un enfant qui sait marcher !
Son ventre est contre vous. Il peut ainsi s’agripper, vous aider, et cette position est bien plus confortable pour tout le monde.


Christine Zeller - Psychomotricienne